Il m'a enfin été donné de découvrir la plume d'Elizabeth Gaskell avec celui qui fut son dernier roman. Son auteur étant morte de manière brutale en novembre 1865, Femmes et filles demeura inachevé, et cela est d'autant plus frustrant qu'il manque à peine un chapitre pour en clore l'histoire... 
Mais que cette frustration n'empêche pas les lecteurs d'ouvrir ce livre, car alors, ils se priveraient d'un bijou.

Femmes et filles qui se déroule dans l'Angleterre rurale des années 1820 met en scène une héroïne qui répond au doux nom de Molly. Une jeune personne droite, au caractère entier, fidèle à elle-même et à ceux qu'elle aime. Autour d'elle, gravite un ensemble de personnages tous différents et passionnants, qui participent à la construction de ce portrait de la société de l'époque.

Premier constat, ce roman se mérite et je me suis demandée si j'allais en venir à bout. Il est vrai que le texte est très long et que le format que j'avais entre les mains n'était pas aisément manipulable.
Deuxième constat, la langue est délectable et j'ai alors décidé de prendre tout mon temps pour savourer pleinement ce récit, ce que je ne regrette pas un instant. Je profite d'ailleurs de ce billet pour rendre tout l'hommage qu'elle mérite à Béatrice Vierne, la traductrice, qui a fait un travail formidable. Je n'ai pas lu ce roman dans sa langue originale, mais cette version traduite en français est remarquablement écrite.

Dans Femmes et filles, Elizabeth Gaskell, à travers l'histoire de cette jeune Molly, dépeint une société et ses travers d'une façon qui m'a semblé résolument moderne. On nous y parle d'amour, d'amitié, de constance dans les sentiments, des positions sociales des uns et des autres, de sciences, de littérature, de la maladie... ce roman aborde une multitude de sujets et nous offre une vision drôle et cynique à la fois.

Imaginez un instant que vous prenez le thé dans un salon du château de Cumnor. Les jeunes femmes sont assises bien droites dans leurs fauteuils, leurs tenues impeccables. Démarre alors une conversation où il est question des dernières rumeurs concernant les villages alentours. On y découvre ainsi les secrets les plus intimes de certains habitants. Il y est questions de scandales, de demandes en mariages accordées puis retirées, d'inconstance... Sur fond de révélations surprenantes, on entend le bruissement des robes de taffetas et le tintement des tasses. Vous êtes dans l'Angleterre victorienne.

Inutile de vous dire combien j'ai aimé ce livre, vous vous en doutiez, j'imagine. Un roman remarquable de lucidité sur une époque qui me fascine. L'écriture est admirable, subtile. Un régal, un de ces textes qui faut déguster avec lenteur pour en savourer toute l'essence.

Je compte bien, après cette première lecture, continuer de découvrir l'univers de Mme Gaskell, mais toujours en prenant mon temps.

Une belle, une très belle rencontre.


Lu dans le cadre de l'opération Masse critique de Babélio

Merci à l'éditeur L'Herne et à Babélio pour l'envoi de ce livre !


Titre original : Wives and daughters
Traduit de l'anglais par Béatrice Vierne
L'Herne, 651 pages, 2005 pour la présente édition, 1865 pour la version originale