Je savais vaguement avant d'ouvrir ce livre de quoi il était question, mais je ne m'attendais pas du tout à ce que j'ai découvert.
Le style d'écriture m'a tout de suite plu et j'ai été frappée à plusieurs reprises par la beauté de certains passages.
Ce roman multiple embarque le lecteur vers la découverte d'une civilisation anéantie par la guerre. Le point de vue de l'auteur est très clair dès les premières pages et oppose notre société "pervertie" avec le monde parfait de Gondawa disparu 900 000 ans plus tôt. De ce dernier, deux humains ont survécu et traversé les âges, témoins de ce passé oublié.
Le récit se déroule sur trois tableaux en parallèle. D'un côté les pensées intimes du Docteur Simon, de l'autre, en alternance, les souvenirs d'Eléa et l'avancée des recherches de l'expédition polaire qui a découvert un vestige de Gondawa.
Parfois la narration devient foisonnante et l'on peut regretter finalement que ce roman soit si court, il y avait matière à développer encore l'histoire et à approfondir bien des sujets.
Je n'ai pas mentionné l'histoire d'amour entre Eléa et Païkan qui est souvent comparée à celle de Tristan et Iseut, elle m'a évidemment touchée, mais il y a bien plus que cela dans La nuit des temps.
C'est à la fois une réflexion sur l'humanité, sur l'essence même du bonheur, sur les progrès de la science... Un livre qui au départ devait être un scénario de film et qui a finalement vu le jour sous la forme d'un roman d'anticipation.
Je ressors de cette lecture émue et avec l'envie de lire d'autres titres de Barjavel.
Une très belle rencontre.

Ils étaient onze, deux Noirs, deux Jaunes, quatre Blancs, et trois allant du café au lait à l'huile d'olive. Mais leurs onze sangs mêlés dans une coupe n'eussent fait qu'un seul sang rouge.

* * *

PaÏkan leva les bras et se laissa glisser derrière elle. Elle s'appuya à lui, assise, flottante, légère. Il la serra contre son ventre, prit son élan vers le haut et son désir dressé la pénétra. Ils reparurent à la surface comme un seul corps. Il était derrière elle et il était en elle, elle était blottie et appuyée contre lui, il la pressait d'un bras contre sa poitrine, il la coucha avec lui sur le côté et du bras gauche se mit à tirer sur l'eau. Chaque traction le poussait en elle, les poussait tous les deux vers la grève de sable. Eléa était passive comme une épave chaude. Ils arrivèrent au bord et se posèrent, à demi hors de l'eau. Elle sentit son épaule et sa hanche s'enfoncer dans le sable. Elle sentait Paîkan au-dedans et au-dehors de son corps. Il la tenait cernée, enfermée, assiégée, il était entré comme le conquérant souhaité devant lequel s'ouvrent la porte extérieure et les portes profondes. Et il parcourait lentement, doucement, longuement, tous ses secrets.

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Vivre les malheurs d'avance, c'est les subir deux fois.

Pour en savoir davantage sur La nuit des temps, je vous renvoie à l'excellent et très complet article de Wikipédia

L'avis de Joëlle


Presses de la cité (collection Presses Pocket) - 380 pages