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vendredi 20 octobre 2023

Les correspondants (Grand Corps Malade, Ben Mazué)

41EkxsrZ61L._SY445_SX342_.jpgCoupDeCoeur2016.pngPrésentation de l'éditeur :

Amis à la scène comme à la ville, les deux artistes échangent sur leurs conceptions de la vie et les coulisses du métier dans une correspondance à la fois drôle, profonde et émouvante, avec cette complicité sincère qui les lie.

***

Quelle belle surprise que cette correspondance ! Je n'avais aucune attente en ouvrant cet ouvrage, si ce n'est le plaisir anticipé de retrouver la plume de Grand Corps Malade.
J'ai d'emblée accroché au style, et j'ai lu ces lettres avec une joie toujours renouvelée. C'était ma récréation du soir avant de dormir, mon moment de distraction.
J'ai aimé la diversité des thèmes abordés, les réflexions des deux auteurs sur la vie, leur façon de rebondir sur les dires de l'autre, d'échanger et de communiquer.
C'était passionnant, bien écrit, toujours intéressants, parfois drôle.
Un coup de cœur.

JC Lattès, 216 pages, 2022

jeudi 6 mars 2014

Funambule ~ Grand Corps Malade

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Hier, j'ai passé une soirée magique.
J'ai eu, grâce à l'idée d'une merveilleuse amie, l'immense joie d'aller voir Grand corps malade à la Carène à Brest. Un concert magique dont je suis ressortie des étincelles dans les yeux et le sourire aux lèvres. 
Je l'ai déjà dit dans ce salon, j'aime beaucoup cet artiste. J'ai tous ses albums, j'ai lu son livre, bref, c'est quelqu'un que j'estime, pour sa sincérité, sa simplicité et aussi et surtout pour la beauté de son écriture. Hier, je le voyais pour la première fois en "vrai" et je n'ai pas été déçue un instant. Il s'est montré tel qu'il est, généreux, accessible, franc, drôle et sensible. Sur scène, il nous a interprété presque tous les titres de son dernier album Funambule et de nombreux autres issus de ses précédents albums. C'était un concert génialissime, vraiment. Au fil des chansons, il nous a fait passer par tout un panel de sentiments, nous proposant des morceaux graves, d'autres plus légers, allant chercher le public de son regard un brin juvénile... Parmi tout ce que j'ai entendu hier, j'ai mes préférences, mais je crois que le titre qui m'a le plus transportée au point de me faire monter les larmes aux yeux, c'est le titre-phare de son dernier album, Funambule. Alors, pour prolonger encore un peu la magie de l'instant, je vous propose de l'écouter aujourd'hui avec moi.

A chaque époque, on s'cherche un peu, et on s'demande si on s'connaît
On est nous même,  on fait s'qu'on peut, on changera pas c'est ce qu'on s'promet
Entre bitume et tapis rouge, j'ai slalomé de part en part
J'côtoie la dech et l'opulence, j’apprends à faire le grand écart
Ma vie propose tellement de thèmes, parfois je fonce parfois je freine
J'vois les deux côtés du système, pourtant j'me sens pas schizophrène
J'essaie de n'pas faire trop d'erreurs et dans mes choix je me sens libre
Je crois en c'truc du fond du cœur, tout est une question d'équilibre
C'est pour ce besoin d'équilibre que j'ai dû prendre un peu de risque
Après un mauvais coup du sort, ma vie partait pour être triste
Écarté des terrains de sport, comme un sursaut j'ai compensé
J'avais besoin d'un autre support, dans l'écriture j'me suis lancé
C'est pour ce besoin d'équilibre qu'il me fallait de l'aventure
Toute mon histoire se refermait, fallait trouver une ouverture
J'ai touché l’accélérateur pour retrouver des sensations
Car comme je marche à 2 à l'heure, il m'fallait une compensation

Je suis un funambule, j'avance loin des certitudes
Les pieds sur terre, l'air dans ma bulle, l'équilibre est une attitude
Je suis un funambule...

Alors j'ai croisé le show-biz, j'ai vu le royaume des égo
Qui pourra faire le plus d'entrées, qui provoquera le plus d'écho
Je ne cracherai pas dans la soupe, là où je suis je me sens bien
Mais pour garder mon équilibre je n'oublierai pas d'où je viens
C'est pour ce besoin d'équilibre que je garde un peu de hors-piste
Car j'aime aussi la vie d'humain quand s’interrompt la vie d'artiste
Entre la lumière de la lune et celle des spots maintenant je sais
Que j'ai ma place à l'Olympia, mais aussi dans les MJC
Je prends du recul, j'prends des gants quand j'vois le strass et les paillettes
Les gens qui se sentent importants, moi ils me stressent et sont pas nets
Je ne cracherai pas dans la soupe, j'ai rencontré des gens très bien
Mais j'me reconnaîtrai toujours plus dans ceux qui viennent là d'où je viens
C'est pour ce besoin d'équilibre qu'on a joué dans des cathédrales
Mais juste après yeux dans les yeux avec un public carcéral
C'est pour ce besoin d'équilibre que tous mes sentiments se touchent
Quand j'vois le public se lever, je pense à mon fils qui se couche

Je suis un funambule, j'avance loin des certitudes
Les pieds sur terre, l'air dans ma bulle, l'équilibre est une attitude
Je suis un funambule...

Si j'aime la nuit c'est grâce au jour, et j'aime le jour grâce à la nuit
J'aime être tout seul grâce à la foule et grâce au silence j'aime le bruit
Besoin d'tout ça pour que ça vibre, j'veux m'sentir fort, j'veux avoir peur
Tout est une question d'équilibre, je crois en c'truc du fond du cœur
Si dans une vie ça part en vrille, c'est que l'équilibre à vrillé
Pour le garder, c'est capital de pas dormir sur ses lauriers
Alors je reste vigilant, quitte à recréer du désordre
Entre le glacé, le brûlant,  j'aime la douceur, j'aime que ça morde
L'équilibre est dans la nature, j'invente rien, ça va sans dire
Il faut de la pluie et du soleil pour que la fleur puisse s'épanouir
Il faut de l’exception dans la règle pour que la vie ait plus de goût
Il faut de la force et de l'adresse pour que l'enfant se mette debout
J'mets d'la lumière pour voir l'avenir, mais parfois j'aime autant l'éteindre
Dans la vie on s'fout de l'objectif, c'qui compte c'est la route pour l'atteindre
Alors j'avance sur un fil, parmi les chemins qui s'éparpillent
En équilibre malhabile, j'suis un funambule à béquille

Je suis un funambule, j'avance loin des certitudes
Les pieds sur terre, l'air dans ma bulle, l'équilibre est une attitude
Je suis un funambule...

samedi 29 décembre 2012

Patients (Grand Corps Malade)

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J'avais à coeur de vous parler de ce roman autobiographique car il m'a énormément touchée. Grand Corps Malade est un artiste que j'apprécie énormément. J'aime sa voix, sa plume, sa vision des choses. Lorsque j'ai su qu'il avait écrit ce livre, j'ai immédiatement eu envie de le lire. Je l'ai dévoré et j'y ai relevé de multiples passages, drôles, émouvants, édifiants.

Grand Corps Malade est un nom de scène qui fait référence à la grande taille du personnage mais aussi à ce terrible accident survenu à l'âge de vingt ans qui le laissa légèrement handicapé. 

Des circonstances limites risibles mais des conséquences graves. Il plonge dans une piscine pas assez remplie, se réceptionne sur la tête et se déplace des vertèbres. Les médecins pensent qu'il ne remarchera pas. Pendant quelques temps il est tétraplégique, mais il finira par retrouver l'usage de ses membres et sa mobilité. 

Dans ce court texte il revient sur cette année passée à l'hôpital, entre rééducation et soins, les rencontres qu'il y a faites, ses progrès, les humiliations vécues, aussi. Sur un ton léger il décrit ces mois de calvaire, cette expérience humaine unique et douloureuse physiquement et psychiquement. Pas de pathos, un style direct, simplement la vérité, un témoignage empli de dignité et tourné vers l'autre. 

A l'image de ses chansons je retiendrai de ce livre que l'auteur est un grand Monsieur, et pas seulement par la taille.

Je connaissais mon plafond de réa dans les moindres détails, chaque tache, chaque écaille de peinture. Il y avait un néon masqué par une grande grille rectangulaire. La grille était composée de quatre cent quatre-vingt-quatre petits carrés. Je les ai comptés plusieurs fois pour être sûr. En réanimation, quand on est conscient, on a le temps de faire pas mal de trucs essentiels...

* * *

Ah oui, pour tous les ringards d'entre vous qui n'ont jamais été tétraplégiques, sachez que manger seul pour un tétra est aussi facile que de voler pour un homme valide.

* * *

Je découvre les joies de l'autonomie zéro, de l'entière dépendance aux humains qui m'entourent et que je ne connaissais pas hier.

* * *

Tout le monde s’habitue. C'est dans la nature humaine. On s'habitue à voir l'inhabituel, on s'habitue à voir des gens souffrir, on s'habitue nous-mêmes à la souffrance. On s'habitue à être prisonniers de notre propre corps. On s'habitue, ça nous sauve.

* * *

Mme Challes vient d'étrangler en moi les dernières traces de l'innocence. J'ai vingt ans et, à partir d'aujourd'hui, la vie ne sera plus jamais la même.

* * *

En prison comme à l'hosto, on attend et on s'emmerde énormément. Et puis, surtout, on parle de l'avenir en utilisant les mots "sortir" et "dehors". Quand on sera "dehors", la vraie vie pourra reprendre...

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Don Quichotte, 163 pages, 2012