127 heures est une réédition française du texte publié pour la première fois en 2005 sous le titre Plus fort qu'un roc. Une réédition qui accompagne la sortie du film (Qui, au passage, ne me tente pas du tout, j'ai vu la bande-annonce, beurk ! La personnalité qui est donnée dans le film au personnage d'Aron ne colle pas du tout à la réalité.) adapté de ce roman-témoignage.

L'histoire, vous la connaissez peut-être, est celle de ce jeune américain qui, en 2003, vécu et vaincu une situation impossible, ou tout du moins ce qui me paraît comme tel.
Nous sommes le 26 avril dans le Canyonlands National Park, Utah. Aron Ralston a prévu une ballade d'une journée entre VTT et canyoning. Le but de l'expédition est de se rendre à la Great Gallery qui se situe dans le Horseshoe canyon pour y admirer des pétroglyphes vieux de plusieurs milliers d'année. Le jeune homme âgé de 27 ans est un sportif accompli, grimpeur et skieur confirmé et amoureux des grands espaces. 
Le parcours qu'il a choisi ne présente pas de difficultés particulières et la météo est plutôt clémente. La journée démarre bien, Aron va au bout de la piste cyclable, abandonne son vélo puis entame la suite de son périple à pied. Après avoir partagé un bout de chemin avec deux jeunes femmes rencontrées à l'entrée du Blue John Canyon  il quitte ces dernières pour terminer la promenade en solo. 
Moins d'une heure plus tard sa vie bascule en même temps qu'un gros rocher. Aron a vu le bloc tomber, tenté de l'éviter mais sans succès. Après avoir ricoché sur la paroi abîmant au passage sa main gauche, la pierre se bloque dans le couloir du canyon coinçant au passage la main et le poignet droits d'Aron.
Ce que relate ce livre, ce sont les 127 heures qui se sont écoulées entre le moment ou Aron a eu son accident et celui où il a retrouvé la liberté. 127 heures dont une bonne partie sans eau et sans nourriture, sans pouvoir bouger ni dormir. 127 heures à chercher désespérément des solutions toutes plus improbables les unes que les autres, à garder espoir pour ensuite admettre que la seule issue possible est la mort. 
Pour sortir de ce canyon, le jeune homme devra prendre la terrible décision de s'auto-amputer le bras. Comment a-t-il survécu à une pareille épreuve, comment son organisme a-t-il résisté si longtemps aux privations d'eau et de sommeil ainsi qu'à la douleur ? On serait tenté de crier au miracle. Ce qui est certain, c'est qu'Aron a bénéficié de sa solide constitution physique mais également d'une force mentale incroyable et de son intelligence.

J'avais envie de lire ce roman, de comprendre le parcours de cet homme, ce qui est passé dans la tête de cet individu qui a réalisé l'irréalisable. Cependant j'appréhendais le côté "sensationnaliste", je craignais de lire un témoignage dans lequel je me serais davantage sentie voyeuse que lectrice. 
Bien au contraire, j'ai trouvé ce livre très pudique et bien tourné. Le récit, qui n'est pas sans émouvoir, ne bascule pas dans le pathos mais expose les faits le plus objectivement possible, presque de façon clinique. J'ai été agréablement surprise de découvrir, au-delà de cette histoire extraordinaire, la plume d'un homme intéressant dont on découvre au fil du livre le cheminement de vie jusqu'à ce 26 avril 2003. La narration alterne ainsi des chapitres qui retracent ses premières expériences avec la nature et cette période de  cinq jours coincé dans le canyon. Grâce à ce procédé, on découvre qui est cet homme et l'on peut dans le même temps souffler un peu avant de retourner au fond du canyon. Parce qu'on y est vraiment dans le canyon. Pendant cette lecture, le sentiment d'empathie que l'on ressent est immense et j'ai pour ma part eu véritablement la sensation d'accompagner physiquement et moralement cet homme que je ne connaissais pas. D'ailleurs,  au moment où j'écris ce billet, je suis encore là-bas en pensée. 

C'est bien sûr une histoire qui émeut, qui bouleverse, mais pas que. Je suis ressortie de cette lecture avec une plus grande conscience encore de ce qu'est la vie, de l'importance des choix que l'on y fait, de la nécessité d'y accepter les événements malheureux et d'aller toujours de l'avant. Mine de rien, c'est un ouvrage qui fait réfléchir et vous ramène à une position d'humilité.

L'avis de Lystig


Titre original : Between a rock and a hard place
Traduit de l'américain par Yves Forget-Menot
Michel Lafon, 303 pages, 2004 pour l'édition originale, 2011 pour cette deuxième édition française