Depuis plusieurs jours, je réfléchis à la façon de rédiger ce billet de lecture. Le temps passe, et je ne sais toujours pas comment vous parler de ce livre. Tant pis, je me jette à l'eau malgré tout. Je vais livrer les idées comme elles me viennent, simplement essayer de vous exprimer ce que j'ai ressenti durant ma lecture.

Déjà, il faut que je vous dise que la culture asiatique ne m'attire pas beaucoup, et encore moins sa littérature. Mais, paradoxalement, je suis assez fascinée par des aspects essentiels de la culture japonaise (le zen, la cérémonie du thé, les samouraïs...) qui reposent sur un esprit maîtrisé, en harmonie avec le corps. Le roman initiatique de Yasushi Inoué m'était donc tout désigné, et je partais avec un a priori positif, peut-être trop d'ailleurs...
Je m'attendais à retrouver l'atmosphère des sublimes film d'Akira Kurosawa où le temps est ralenti, la nature magnifiée, chaque chose, chaque être se trouve à la bonne place, dans un juste équilibre fragile et beau à la fois.
Bien que n'étant pas une buveuse et connaisseuse de thé, j'aime les objets qui s'y rapportent, la couleur de ce breuvage... J'espérais en lisant Le maître de thé en savoir davantage sur la fameuse cérémonie du thé, éclairer ma compréhension de cette philosophie du thé.
Vous l'aurez compris, j'avais donc des envies et des attentes en ouvrant ce livre. Malheureusement, elles n'ont pas été satisfaites.

Pour ceux qui ne l'ont pas lu, je resitue l'histoire et le contexte : à la fin du XVIème siècle au Japon, le célèbre maître de thé Rikyu se fait seppuku sur l'ordre, semble-t-il, d'Hideyoshi, le conseiller de l'empereur, homme puissant et influent.
Honkakubo, disciple de Rikyu, s'interroge bien après la mort de son maître, sur les raisons de ce suicide inexpliqué... Le semblant d'enquête qu'il mène auprès des proches de Rikyu qui sont encore en vie, n'est en réalité qu'un prétexte, puisque la véritable motivation de ce roman est de proposer une vision et une réflexion sur la voie du thé (du moins c'est ainsi que je l'ai compris, si toutefois j'ai compris quelque chose...). L'histoire, fictive, n'en est pas moins basée sur des faits et personnages réels, et le fond historique et politique du roman est très riche.

L'introduction étant faite, j'aurais envie de vous dire que pour qui n'est pas passionné par le thé ou l'histoire duJapon, mieux vaut passer son chemin et laisser ce livre sagement fermé, et ce serait sans doute réducteur, mais c'est ce que j'ai ressenti.
Et pourtant, concernant la cérémonie du thé, je suis restée sur ma faim. J'aurais aimé plus de détails dans la description du rituel (les ustensiles, les récipients, les tenues, l'agencement de la salle, etc.). Yasushi Inoué parle de tout cela, mais de façon suggestive plutôt que descriptive, et au final, il m'a été impossible de me faire une image précise de cette cérémonie. C'est la critique principale que je ferai de ce texte, le manque de profondeur (entendons-nous bien, je ne parle pas du fond, mais de la forme). Les personnages et les relations qu'ils tissent entre eux sont également très flous, aucun dialogue n'est abouti, là encore on est dans la suggestion, et à la longue ça m'a vraiment lassée.
Je suis profondément navrée de le dire, mais Le maître de thé est une grande déception pour moi. Connu mondialement comme un chef d'œuvre, ce roman m'a ennuyée, n'a fait que me donner des envies sans jamais les satisfaire. A cela s'ajoute la langue, et là je m'interroge : est-ce la traduction de l'édition que je possède où le texte original qui est ainsi ? J'ai trouvé le niveau de langue peu soutenu, et le style plutôt banal. L'écriture de certain passages m'a semblée de bien meilleure qualité, mais globalement elle m'a déçue dans l'ensemble.

Voilà, j'ai bien conscience que je vais choquer plus d'un lecteur avec ce billet et que c'est drôlement gonflé de ma part de juger si négativement une œuvre habituellement portée aux nues, mais cet humble avis n'engage que moi.

Par contre, et c'est la bonne nouvelle, cette lecture m'a donné envie de me plonger dans l'œuvre d'un autre auteur japonais Yukio Mishima dont j'ai entendu parler de façon très élogieuse.

Pour contrebalancer le mien, l'avis nettement plus positif de Lune de pluie.

Stock (collection Le livre de poche) - 157 pages
Traduction de Tadahiro Oku et Anna Guerineau