J'ai sans-doute laissé passer trop de jours s'écouler depuis que j'ai lu ce livre et je ne sais toujours pas comment en parler. En réalité, avec du recul, plus le temps passe, plus l'impression que j'avais au départ s'estompe...
Pour faire court, disons que j'ai lu avec un relatif plaisir la première partie de l'histoire et que la seconde m'a ennuyée. C'est assez terrible de balancer ce genre de phrase quand il s'agit d'un texte si noir, que voulez-vous, c'est ce qui s'est passé.


Mais revenons à l'histoire, pour ceux qui n'auraient pas fréquenté les blogs de lecture ces dernière semaines et ne sauraient pas de quoi il s'agit ! 
Roy, 13 ans et son père Jim vont aller vivre sur la côte sud de l'Alaska pendant un an. Le paternel a acheté là-bas une cabane sur une île paumée située à distance de toute habitation/vie humaine et seulement accessible par bateau ou par hydravion. Ce décor en apparence idyllique cache en réalité un mode de vie sauvage bien éloigné des préoccupations citadines.
Sauf que Roy n'est qu'un adolescent, et même s'il est plutôt dégourdi pour son âge il n'a pas la force physique ni les compétences/connaissances nécessaires pour s'adapter sans difficulté à un tel milieu. Quant à son père, on se demande bien quelle mouche l'a piqué, car il débarque sur cette île en parfait ignorant, affrontant les problèmes les uns après les autres, comme s'il ne s'était pas soucié un seul instant de la façon dont ils allaient survivre sur cette terre. Car il s'agit bien ici de survie.
A cela, s'ajoute la personnalité du père à qui j'aurais volontiers filé deux paires de baffes pour le réveiller. Il est clair dès le départ pour le lecteur que Jim est dépressif et n'a entraîné son fils dans cette aventure que pour se changer les idées, prendre un nouveau départ dans sa vie et se ressourcer. Un acte donc totalement égoïste, et l'on comprend dès les premières pages que tout cela ne peut que mal finir. Le pauvre adolescent qui a suivi son père pour lui faire plaisir se retrouve dans un lieu hostile et isolé, avec pour seule compagnie celle d'un père qu'il connaît peu et passe ses nuits à pleurer en lui confiant ses soucis d'adulte. 

ATTENTION SPOILERS

Alors certes, le climat psychologique oppressant est bien rendu, on perçoit cette terrible tension jusqu'au point de rupture et le début de la seconde partie du roman retrace bien ce qui se passe dans la tête d'un individu quand il vient de perdre un être cher, la déraison, l'angoisse, l'espoir et la descente aux enfers.
Sauf que c'est trop long, bien trop long...
On voudrait bien abréger ses souffrances au pauvre père, on voudrait bien abréger sa vie tout court d'ailleurs... Si les premiers moments m'ont parfois amusée (rassurez-vous, je ne suis pas dingue ni insensible mais j'aime l'humour noir, et heureusement il y en a un peu dans cette nouvelle) et surtout touchée, cela m'a très vite lassée. Une centaine de pages pour expliquer que le corps du fiston est en décomposition avancée (avec détails à l'appui...) et que son andouille de père n'est pas fichu d'aller chercher des secours parce que dans un moment de folie il a brisé les seuls moyens de communication avec l'extérieur qui s'offraient à lui... bref, suivre les méandres de cet esprit torturé m'a ennuyée même si c'est bien écrit, même si l'auteur parvient avec brio à explorer toute la psychologie du personnage.

SPOILERS OFF

Alors voilà, je n'ai pas trouvé ce que je cherchais dans Sukkwan island. Au lieu de la sublimation de la nature (qui finalement est peu présente dans cette nouvelle, et c'est tout le paradoxe de ce texte qui fait partie de la collection Nature writing ;  ici on aurait pu parler plutôt de Human writing...) que j'attendais, on est assailli par le psychisme des deux héros, et aussi bouleversante que soit cette histoire, elle m'a laissée relativement indifférente. Je n'ai pas débarqué sur cette île, je suis restée spectatrice depuis le rivage.

Ceci étant, il ne s'agit bien entendu que de mon ressenti personnel, de mon simple plaisir de lecture que j'exprime ici. Je ne me permets pas de juger cette oeuvre autrement que selon ce critère, d'autant que son côté autobiographique change inévitablement le regard qu'on peut y porter. Il est indéniable que cette souffrance et ce désespoir sont admirablement retranscrits en mots, simplement cela n'a pas suffi à la lectrice que je suis pour apprécier pleinement cette histoire sombre.


Mais ne vous fiez pas à mon ressenti et allez consulter les billets de ICB et Cryssilda pour vous convaincre que Sukkwan island a séduit plus d'un lecteur.

D'autres avis chez BOB


Lu dans le cadre de L'opération Masse critique de Babelio

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Merci à l'éditeur Gallmeister et à Babelio pour l'envoi de ce livre !


Gallmeister (collection Nature writing) - 212 pages